lundi 24 juillet 2017

Alloco, spécialté ivoirienne

Originaire de l'Asie, la banane plantain serait arrivé en Afrique par Madagascar par les premiers navigateurs indien ou de la péninsule arabique. Elle est la base de l'alimentation de près d'un demi milliard d'habitants dans le monde. On la retrouve, mis à part en Asie et en Afrique, en Amérique Centrale et du Sud, dans les Caraïbes, dans le sud des États-Unis, dans le nord de l'Australie et dans les îles du Pacifique et en Nouvelle Calédonie. 

On ne peut consommer la banane plantain cru parce que sa teneur en amidon est trop élevé ce qui la rend indigeste. Dans certains pays, elle est consommé bouillie, frite ou fermentée et cuit à la vapeur. Aujourd'hui, je vous présente cet aliment de mon enfance qui est frit dans l'huile. 

Bien que ce plat se retrouve dans plusieurs pays d'Afrique de l'Ouest sous divers nom, l'alloco demeure un plat national en Côte d'Ivoire. Fait de bananes plantains mûres, l'alloco est généralement cuit dans l'huile de palme dans les régions urbaines et dans l'huile d'arachide dans les régions rurales. Elle est servie avec du poisson ou des viandes mais peut être manger également seule.

Je me rappelle, comme si c'était hier, de nos premières dégustations de l'alloco après le retour de l'école. Ma mère me donnait 100 francs CFA (ce qui équivalait environ à l'époque à 25 cents canadien) et je courrais à la rencontre de la vendeuse situé à quelques mètres de l'immeuble où nous habitions. Je salivais de voir toute cette quantité de bananes cuites dans l'huile. Je n'étais pas consciente à ce moment des dangers de l'huile de palme, tout ce qui m'intéressait c'était de tremper mes doigts dans le plat et d'y prendre une bouchée. Je l'anticipais d'ailleurs en pensant à tremper chaque bouchée dans le fameux piment abidjanais. J'avais hâte de revenir à la maison. Ces longues minutes à attendre me semblait interminables. Devant la chaleur intense que projetait le barbecue en charbon de bois et celui du soleil brûlant, une chose n'avait de l'importance... que ces tranches d'alloco se retrouve rapidement dans mon estomac affamé.  

Et puis le moment fatidique arriva, les bananes étaient cuites, foncées et presque marrons. La louche à la main, la vendeuse ramassa une grosse poignée d'alloco, l’égoutta trois ou quatre fois en cognant sur le bord de l'énorme casserole  de cuisson pour enlever le surplus d'huile et déposait cette énorme cuillère dans un papier journal en forme de cône. Elle répéta cette manœuvre une deuxième fois, ferma le morceau de papier et me le tendit. Vous avez bien lu, à cette époque et même encore aujourd'hui dans certains pays africains, on égouttait sur du papier journal ou même sur du papier de ciment. Ce papier permettait d'absorber le surplus de gras et d’imprégner en même temps quelques gouttes d'encre du journal sur les premières tranches d'alloco. Nous n'en sommes pas morts, la preuve, j'écris ce blog. Parfois, ma mère me donnait un plat maison afin que la vendeuse y dépose les plantains. À cette époque, les moyens d'aseptisations étaient moins présents. Aujourd'hui, malgré le fait que ce papier de ciment est dangereux, il demeure encore moins cher pour ces vendeuses, nous sommes un peu plus conscients des dangers qu'il peut provoquer, les mentalités changent tranquillement. La méthode du papier journal est encore utilisée dans la friture et est très efficace sauf qu'aujourd'hui, on suggère de mettre du papier absorbant entre l'aliment et le journal. 

Ceci dit, revenons à nos allocos... Une fois le paquet prêt, je courais vers la maison et ma mère déposait les bananes dans un plat. Notre collation de fin d'après-midi était prête à être dévorer par des piranhas végétariens... On s'installait sur le balcon et nous dégustions chaque bouchée en pensant à la prochaine. Chaque bouchée représentait un morceau de bonheur. Tendre, mou et sucré, par des moments de témérité, j'osais trempé une tranche d'alloco dans le piment. Puis, je me précipitais en manger trois ou quatre bouchées rapidement pour en enlever ce goût de piment. Aussi, était-ce une façon d'en manger un peu plus que les autres. J'évoquais le goût piquant désagréable pour expliquer cette orgie culinaire. Mon frère et ma sœur ne voyaient que du feu. Du moins, c'est ce que je croyais puisque ça marchait à chaque fois. Nous mangions presqu'en silence, en regardant chaque bouchée que l'autre prenait et faisons la remarque si une bouchée était plus rapide que les autres. Tout était savamment calculé, comme une horloge suisse, nous suivions tous le même rythme afin d'éviter les plus rapides en prenne davantage. Plus le plat se vidait, plus j'espérais que la fratrie se tanne d'en manger et que je me retrouverais, seule, à terminer le plat, wahou, l'extase finale! Mais mon souhait ne s'est jamais réalisé, je pense que nous avions tous les trois le même.  J'étais un peu, beaucoup, passionnément gourmande encore aujourd'hui.



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